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Des militaires améliorent leur équipement à leurs frais - La Presse

Yrys

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Des militaires améliorent leur équipement à leurs frais



La Défense canadienne a investi 1,1 milliard au cours des 10
dernières années pour mieux habiller ses troupes. Malgré tout,
et en dépit d'une interdiction formelle inscrite dans le Manuel
d'instruction militaire, de nombreux militaires préfèrent piger dans leurs poches pour s'acheter leur propre équipement de base. Sécurité et efficacité obligent, disent-ils.

Au premier rang des articles fournis par l'armée sur lesquels
les soldats lèvent le nez: le «gilet tactique». Portée par-
dessus l'armure, cette pièce d'équipement, munie d'une douzaine de poches utilitaires, est loin de faire l'unanimité dans les rangs. «La veste qui nous est fournie a deux principaux défauts, explique André, soldat spécialiste de
Valcartier qui sera déployé en Afghanistan à la fin de mars. Premièrement, elle ne permet de stocker que 4 chargeurs de
30 balles», alors que l'armée en confie une dizaine aux soldats
envoyés en mission. «Deuxièmement, elle n'est pas modulaire ; on ne peut donc pas l'adapter aux besoins spécifiques de
chaque soldat.» Par exemple, un mitrailleur de section a besoin
de grands compartiments pour ses munitions, qui tiennent
dans des barils de tissu d'environ 6 pouces par 6 pouces. Or, le gilet tactique ne permet pas de stocker ces barils. «Bref, il
n'est pas du tout adapté aux opérations de combat en Afghanistan», explique André.

Comme des dizaines d'autres soldats insatisfaits du gilet imposé par l'armée, André s'est acheté son propre gilet
tactique modulaire sur l'internet. Coût: 200$. Somme à laquelle il a ajouté 150$ pour des bottes «bonnes pour un an». Celles de l'armée, dit-il, sont moins confortables et évacuent moins bien l'humidité. Selon nos informations, bon nombre de soldats achètent aussi des slings, des courroies pour arme à feu conçues pour maintenir le fusil en position optimale lorsque le soldat utilise ses deux mains pour vaquer à d'autres occupations. «Certains vont même jusqu'à acheter des mires holographiques ou des poignées pour assurer une meilleure stabilité pendant les tirs automatiques avec leur arme à feu, note André, mais c'est de moins en moins nécessaire.»

Pour afficher un style unique sur le champ de bataille, certains soldats s'achètent aussi leurs propres paires de gants, des sous-vêtements «haute performance» et même des lunettes balistiques produits par des grandes marques à la mode. «Ceux-là, on les appelle les "Joe-Kit". Ils veulent toujours avoir leur petit équipement fancy. C'est une façon pour eux de montrer leur personnalité», explique André.


Un marché vigoureux

Difficile de déterminer précisément combien de soldats
canadiens font comme André. « Je dirais que c'est à peu près le tiers des gars qui le font », avance-t-il. Dans certains cas, ce sont même les officiers qui s'adonnent à ces achats.

Chose certaine, «ce marché de l'équipement tactique privé est
très vigoureux», estime Yves Bélanger, spécialiste de l'armement militaire à la faculté de science politique de l'UQAM. Selon une évaluation faite par le Christian Science Monitor, alors qu'il était presque inexistant avant le 11 septembre 2001, le marché de l'équipement tactique a atteint 150 millions de dollars en 2008 aux États-Unis seulement. «On vend vraiment un peu de tout aux soldats, sauf des armes à feu», confirme Darren Cole, président de One Shot Tactical, un des plus importants fournisseurs d'équipement militaire au pays, qui s'annonce abondamment sur le forum Army.ca, consulté
quotidiennement par les milliers de militaires.

Tolérance

Loin de faire l'autruche, l'armée canadienne est très consciente du phénomène. Le «contentieux» entourant le gilet
tactique est particulièrement bien connu de la chaîne de commandement. Mais il n'est pas pour autant question pour l'armée de se plier aux désirs tactiques des militaires.

«Quatre chargeurs, plus un dans l'arme à feu, c'est 150 balles.
C'est une force de feu considérable et, plus concrètement, cela représente un poids très important pour des soldats qui supportent déjà une charge de plus de 70 livres, explique le colonel Jean-Marc Lanthier, directeur des besoins en ressources terrestres à la Défense. Si on ajoute cinq
chargeurs supplémentaires, c'est 20 à 25 livres de plus à porter. Ce serait un handicap immense pour les soldats sur le
terrain, d'autant que depuis le début de la mission en Afghanistan, 25 000 d'entre eux sont allés au front et en sont
revenus; aucun d'eux n'est mort parce qu'il a manqué de balles en pleine action», insiste-t-il. Devant les plaintes nombreuses des soldats, l'armée a néanmoins jugé bon de tester plusieurs gilets tactiques sur le terrain. «Aucun ne s'est révélé parfait», assure le colonel Lanthier.

N'empêche, même si techniquement, le Manuel d'instruction sur la tenue militaire interdit clairement aux soldats d'acheter et de porter de l'équipement provenant de fournisseurs tiers,
sur le champ de bataille, les officiers affichent une certaine
tolérance. «Les commandants ont de la latitude dans
l'application du règlement», admet le colonel Lanthier. Mais pour les soldats, investir dans l'achat de gilets tactiques ou de bottes équivaut tout de même à jouer à la loterie: «Il y a des unités où personne ne se fait déranger lorsqu'ils portent leur propre équipement. Dans d'autres unités, c'est impossible, explique André. C'est dommage, parce que les soldats sont soumis à des règlements de standards qui vont à l'encontre de l'efficacité au combat. Ultimement, ça peut même être
dangereux pour leur vie», croit-il.

«Heureusement, on sait très bien à quoi s'en tenir avant de partir en mission ; les gars qui reviennent d'Afghanistan nous tiennent au parfum.»
 
Des soldats britanniques et américains boudent aussi leur matériel

Les soldats canadiens ne sont pas les seuls à bouder une
partie de l'équipement fourni par l'armée. En Grande-Bretagne,
dans l'année qui a suivi le déclenchement de la guerre en Irak, 55% des soldats et 42% des officiers ont acheté des ensembles militaires sur l'internet ou dans les surplus de l'armée, indique un sondage publié dans le magazine Soldier.

Chez nos voisins du Sud, le phénomène a pris de telles proportions qu'en 2006, le Congrès a dû adopter une loi pour rembourser jusqu'à hauteur de 1100$ des plaques pare-balles achetées sur l'internet par les militaires entre 2001 et 2004.



Si, pour certains Marines américains, l'achat de ces ensembles
était avant tout une affaire de style, pour d'autres, c'était
une simple question de survie. En octobre 2003, les médias avaient rapporté qu'en raison d'une pénurie, plus du quart d'entre eux n'avaient pas reçu les plaques pare-balles de céramique censées les protéger contre les balles ennemies.
En peu de temps, des dizaines de sites spécialisés portant
des noms comme Cheaper Than Dirt, U.S. Cavalry et Brigade Quartermaster ont vu leur chiffre d'affaires exploser.
L'entreprise californienne Pinacle Armor, fabricante d'une plaque de protection appelée Dragon Skin - la préférée des mercenaires à l'emploi de firmes privées de protection
présentes en Irak, mais rejetée par l'armée en raison de son
coût et de son efficacité -, a fait des affaires d'or.


Mais depuis le début du programme de remboursement adopté
par le Congrès, l'armée américaine a resserré la vis. Tout soldat pris à porter une armure non réglementaire doit désormais la remplacer sur-le-champ. «Nous sommes très préoccupés par le fait que des gens déboursent de l'argent durement gagné pour acheter du matériel qui n'assure pas un niveau de protection aussi élevé que celui que nous
exigeons», a déclaré à l'Associated Press le colonel Thamas
Spoehr, directeur du matériel de l'armée américaine.

Depuis, les affaires ont ralenti chez les revendeurs d'attirails militaires. «Le gros de notre chiffre d'affaires provient
maintenant des civils ou des organisations policières. On ne vend plus grand-chose aux militaires», affirme Andrew Koehler,
responsable du magasin en ligne BulletProofMe.com.
 
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